"À une époque où tout est de plus en plus prévu, programmé, organisé, pouvoir se perdre sera bientôt un délice et un luxe exceptionnels" Gaston Rebuffat


7 h 00 du matin.
4810 m d'altitude.

Une crête enneigée s'égare dans le brouillard. Je n'entends plus que mon cœur qui bat, essoufflé par l'altitude. Nous sommes au sommet du toit de l'Europe, le Mont Blanc.
Pour la première fois depuis ce matin nous apercevons le soleil, la tempête s'est arrêtée. L'ascension nocturne a été délicate.

Mais...
Loin des sommets renommés, ce que je préfère simplement c'est pouvoir me perdre !

Voilà déjà plusieurs années que je sillonne les montagnes, hors des sentiers balisés et fréquentés avec mon sac sur le dos et mon appareil photo dans les mains.
Je ne vais nulle part.
Je vais seulement là, là où un jour mes yeux ont regardés.

Cette année j'ai la chance d'avoir été pris pour une formation en cinéaste pour documentaire animalier. Peut-être qu'un jour j'aurais la joie de vivre de ma passion. Mais pour cela je dois descendre des montagnes...
Alors, suivez-moi, je vous transmet mes dernières images d'altitude, dans une belle ascension !


La nuit est encore là, il faut partir.
Les étoiles scintillent, mais elles commencent à s'effacer une à une du ciel.
Enfin, les premières lueurs apparaissent.
La levée du jour est tout le temps un instant magique. Les sons se propagent mieux et de manière distincte, c'est pour ça que les oiseaux préfèrent chanter à cette heure la.

Cette histoire commence en forêt...


L'écureuil se réveille. Il s'étire, avant de sauter de branche en branche.
Quelques nuages animent le paysage.


Je m'aventure dans un vallon sauvage où coule un ruisseau. Le ciel est rose. Le vallon est encore dans l'ombre.
L'eau qui s'écoule entre les rochers reflète la couleur du ciel comme un miroir mouvant. C'est magnifique.


Je traverse le ruisseau et retourne dans les bois. Les premiers rayons du soleil arrivent sur le versant d'en face.




J'aime disparaitre, essayer de maîtriser le monde du camouflage pour pénétrer l'intimité de la nature.
Ne pas déranger, savoir observer, et essayer de saisir l'image, celle qui restitue l'ambiance et qui garde une part de mystère.


Oui, il est difficile de rester là, sans bouger. D'apercevoir des ombres qui se déplacent entre les buissons, et de ne rien faire, au risque de les déranger...
De reste là, tapis dans la mousse, au pied des grands arbres en étant toujours à l'affût du moindre bruit, du moindre mouvement.
Mais quel bonheur, quand on est ici, perdu dans une grande forêt, au milieu de nulle part, et que la très discrète gélinotte descend nous voir à quelques mètres, en marchand lentement sur sa branche.



Parfois c'est le pic épeiche qui va et vient à son tour entre les arbres. Il virevolte de troncs en troncs à la recherche de vers et de petits insectes. L'oiseau aux belles couleurs flamboyantes parait insaisissable. Il apparait, il disparait. On l'entend crié derrière un tronc d'arbre, mais on ne le voit pas. On l'aperçoit juste quand il s'envole.


Pourtant en essayant de comprendre l'oiseau, et en restant entièrement discret à notre tour, on remarque qu'il a ses habitudes quotidiennes.


Il suffit d'un jour, un jour où la lumière est là, où l'oiseau se rapproche...
Un jeune cerf sort discrètement de la lisière. Il a ses bois qui repoussent en velours. Il observe l'oiseau.


Tout est calme. Le pic arrive. Il vient se poser là, sur la bonne branche. Alors, vu qu'il n'y a rien d'inquiétant dans les parages, il commence sa toilette et nous offre un joli spectacle.



Tout à coup, un renard s'avance en contre-bas, dans les hautes herbes !


Mais le pic n'a rien à craindre, alors lentement il finit sa toilette. Il s'étire une aile...


Et puis l'autre.


Il est prêt pour le décollage, au dessus des sabots de vénus.


Et repart en quête d'un bon casse-croute riche en protéine !



J'aime partir là-haut, sauter de rocher en rocher pour traverser les ruisseaux, marcher, ou s'arrêter au soleil contre le tronc d'un mélèze pour se reposer.


Mais la nature est toujours en mouvement. Là, quelque chose fait bouger des feuilles au pied d'un arbre mort. Non ce n'est pas le vent.
Alors je me prépare, l'œil dans le viseur de l'appareil photo, prêt à déclencher.
Qu'est-ce qui va sortir de ce buisson ?
Qui va détaler dans la pente ou sortir prudemment ?


C'est un grand pic noir qui remonte le long de l'arbre mort.
Je m'amuse à l'observer, avec ses beaux yeux jaunes et sa tête qui pivote à 180 degrés.


Puis je repars, je continue l'ascension, vers le sommet...
Je finis par sortir au dessus des arbres, dans les prairies d'altitudes.
Ici la vue s'élargit, la pente se renforce.
Mais c'est toujours un bonheur de partir à la rencontre des chamois, bouquetins, et autres habitants des cimes !


C'est un vrai plaisir de monter là-haut, de se perdre dans le brouillard... Là où la météo peut changer en quelques minutes.



Je cherche les animaux, à l'œil nu ou aux jumelles.
Jusqu'à ce qu'enfin, je repère des silhouettes !


Alors entièrement camouflé, je rampe dans l'herbe. J'avance toujours sur le qui-vive, je fais attention au sens du vent pour ne pas me faire repérer. Je me déplace sans faire de bruit.
Tout à coup je m'arrête !
Les petits cabris de chamois arrivent. Ils sont âgés de quelques semaines. Ils jouent à se courir après sur la crête et font de belles cabrioles !


Pour se reposer, ils retournent auprès de leur mère. Ils restent en sécurité à proximité des parois où les chocards se sont regroupés.


Parfois un peu de pluie arrive, voir de la foudre. Mais toujours, le soleil finit par revenir.



Le vent peut aisément chasser les nuages.


Alors je m'active ! Je marche, je grimpe... Je pars en quête d'une belle lumière pour essayer de saisir quelques photos.


Et la nature a toujours de belles choses à nous offrir, si l'on prends le temps d'ouvrir les yeux.



Et soudain tout se suspend, tout s'arrête. Le soleil est là. Un chamois s'avance, dans les premiers rayons...


Le faucon vient faire du surplace pour chasser.


Et les femelles bouquetins s'en vont au milieu des rochers, surprenant quelques chocards qui se sont posés ici.



Plus bas, un son résonne. Deux jeunes bouquetins se battent sur un rocher.



Ce qui inquiète les chamois qui ne savent pas où aller.



L'été c'est aussi la saison où la végétation colore la montagne, et les papillons donnent vie à ce milieu.




Et voilà, en milieu de journée, les animaux vont se reposer au frais. Tout devient calme, tout parait vide. Dans certains endroits les sentiers se remplissent de randonneurs qui cherchent aux jumelles quelques chamois et bouquetins. Dans d'autre il n'y a plus rien qui bouge.
Alors il n'y a plus qu'à profiter du beau temps pour faire une petite sieste.
Mais en fin d'après-midi, il est temps de repartir, de s'égarer...

En montagne, il y a des avalanches, du froid, des chutes de pierres, du vide...
Je me réjouis toujours d'avoir la chance d'observer des petits chamois, et je me dis que la vie triomphe toujours.


La lumière diminue. Il faudrait peut-être faire demi-tour, je n'ai pas de lampe pour rentrer.
Mais je préfère rester là, quelque part dans cette montagne...
La température baisse.
La lumière s'adoucit.

Un renard c'est endormit au creux d'un arbre cet après-midi.


Il se réveille doucement.
C'est l'heure de partir en chasse !


Soudain une femelle bouquetin arrive.


Alors je m'assois, à moitié caché dans la lande à rhododendrons. Je ne fais pas de gestes brusques.
La femelle ma repérée. Elle est accompagnée de son petit.
Après un bon moment, je gagne leur confiance. Elle sait que je suis là, mais je ne suis pas un danger.
Alors ils se rapprochent de moi. Lentement je monte mon appareil photo devant mon visage.
Je regarde dans le viseur, et je profite de cet instant privilégié dans le calme des dernières lueurs de la fin de journée.


Puis le petit, tout curieux, s'avance vers moi et me regarde en se cachant derrière les rhododendrons. La lumière n'éclaire plus que le versant opposé.


Alors lentement je me met en route. Mais je ne redescend pas. Non, ce soir je reste là-haut, je ne veux pas passer à côté de ces derniers instants. D'autres bouquetins viennent de sortir, tout autour de moi. Tant pis, ce soir je m'égare dans les dernières lueurs.
Je reste seul là-haut.
Je me perds.



Le cadre est idéal pour profiter d'une belle soirée.


Il est bientôt temps de s'allonger dans l'herbe. Et de rêver des chamois et bouquetins qui parcours les sommets.




Il fait assez froid maintenant.
Je ne sais pas où je suis.
On ne voit presque plus rien.


Mais ce qui est sûre, c'est que j'y suis bien. Aurais-je vu tout sa si j'étais rentré bien au chaud, pour dormir dans un lit confortable ?


Merci de votre lecture !

Si j'aime la montagne, je voudrais dédicacer ces photos à une coline particulière qui se reconnaitra ;-)

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